Respect sain des risques

Derrière mon bureau, un nouveau quartier est en train de sortir de terre. Une entreprise locale de construction y travaille avec une dizaine d’employés et une panoplie de machinerie: excavatrices, bulldozers, camions-bennes, et plus encore. Ils ont commencé par le déboisement du terrain, et sont maintenant rendus à l’installation des infrastructures essentielles comme les conduites d’eau et d’égouts.

Je me surprends souvent à regarder par la fenêtre pour voir l’avancement des travaux. Et depuis un mois, j’observe avec admiration ces immenses machines transformer complètement le paysage. Ce qui me frappe, c’est à quel point les travailleurs opèrent au quotidien, tout près de ces engins lourds et dangereux, sans que je n’aie été témoin d’un seul incident. Ce sont des conditions de travail à haut risque. Alors comment arrivent-ils à travailler si près de ces équipements de façon sécuritaire?

Le mois dernier, notre infolettre portait sur le niveau de vigilance face aux risques – un faible niveau de vigilance se traduit par un excès de confiance ou un faux sentiment de sécurité, ce qui peut mener à ignorer ou minimiser les risques. En somme, un manque de respect pour ce qui pourrait nous blesser. Et ce que j’observe sur ce chantier, c’est justement l’inverse: Une équipe qui démontre un véritable respect des risques présents sur le chantier.

Chaque matin, les travailleurs arrivent vêtus de leurs gilets haute visibilité, le casque solidement fixé avant même de quitter leur véhicule. Leur attitude témoigne d’un réel engagement envers la sécurité. J’ai observé des communications claires et constantes entre les opérateurs de machinerie et les membres de l’équipe au sol. Chacun reste attentif, et on voit les collègues s’écarter instinctivement pour laisser aux équipements l’espace nécessaire pour manoeuvrer en toute sécurité. Le contremaître, lui, veille au bien-être de son équipe: chaque jour, il apporte une caisse d’eau fraîche accompagnée de sacs de glace pour aider tout le monde à faire face à la chaleur accablante de l’été.. Et tout ça me fait réfléchir: si une telle rigueur est possible dans un environnement aussi dangereux, que pourrions-nous accomplir dans des milieux moins risqués?

Il y a là une belle leçon à tirer. Et je me demande : ce respect des dangers pourrait-il s’appliquer dans d’autres milieux comme le commerce de détail, les soins de longue durée ou même les bureaux? On sait que la violence, le harcèlement au travail et les troubles musculosquelettiques sont bien présents. Alors comment agir concrètement? Comment éviter les incidents liés aux équipements, comme un taille-clés ou un convoyeur? Comment cultiver un respect véritable pour les risques présents dans notre quotidien?

Tout commence peut-être par le leadership. Lorsque les gestionnaires accordent une réelle importance à la santé et à la sécurité, ils insufflent une culture qui rayonne à tous les niveaux. Des politiques claires, des procédures concrètes, des formations adaptées et, surtout, un climat de confiance où chacun se sent libre de poser des questions et de discuter ouvertement des risques — voilà les bases d’une véritable culture de prévention durable.